Animaux sauvages et biodiversité

Les espèces animales, composantes essentielles de la biodiversité, connaissent actuellement une forte érosion : en France, 14 % des mammifères, 24 % des reptiles, 23 % des amphibiens, 19 % des poissons d’eau douce, 28 % des crustacés d’eau douce et 32 % des oiseaux nicheurs sont menacés de disparition (UICN, 2019) . Parmi les menaces qui pèsent sur ces espèces, on peut citer la perte d’habitat, le changement climatique, les pratiques agricoles et halieutiques intensives mais aussi la chasse. La chasse est un loisir mortifère : environ 30 millions d’animaux tués chaque année (ONCFS, 2014), et 410 personnes sont décédées sous les balles des chasseurs en France entre 1999 et 2019 (ONCFS/OFB). Nos ONG réclament une réforme de la chasse avec l’interdiction de certaines pratiques et un meilleur partage de l’accès à la nature, ainsi que la préservation des espèces et de leur habitat.
Mesure 19 : Atteindre en 2030, 10 % de libre évolution sur chacun des écosystèmes terrestres et marins, en métropole et en outre-mer.

Aujourd’hui en France, moins de 1,54% du territoire métropolitain terrestre bénéficie d’une protection dite « forte »*. Or à l’intérieur de ces espaces de protection « forte », l’exploitation forestière, le pastoralisme et la chasse sont encore bien présents. On peut estimer que seuls 0,6% du territoire terrestre métropolitain français assurent la libre expression des processus naturels.

La nature libre, autonome, spontanée et sauvage a des capacités de réparation étonnantes, à condition qu’on lui en laisse l’espace et le temps. Sans intervention humaine quelle qu’elle soit, la forêt se reconstitue, la faune revient et retrouve sa densité naturelle sans qu’il y ait besoin de la réguler, grâce notamment aux grands prédateurs. De plus, les espaces en libre évolution permettent de limiter les effets du changement climatique. Plus nous laissons une forêt vieillir naturellement, plus sa biomasse est importante. La forêt devient un puits de carbone et constitue un frein au réchauffement climatique.

La stratégie nationale des aires protégées de la France à l’horizon 2030 vise un objectif de 10 % de protection forte des écosystèmes terrestres et marins.  Mais cette protection « forte » n’est pas suffisante. Nous souhaitons donc :

  • Le renforcement de la protection forte française pour que les 10% promis le soient en libre évolution en adoptant la définition européenne des zones de nature vierge**.
  • La création de zones de libre évolution à l’intérieur d’espaces encore trop mal protégés (Parcs Naturels Régionaux, zones Natura 2000, etc.) mais aussi là où cela sera profitable à de nouveaux territoires. Créons de nouveaux outils pour faciliter leur mise en place.
  • La possibilité pour toutes les composantes d’un écosystème d’évoluer librement afin de garantir son fonctionnement optimal.
  • L’incitation des propriétaires privés à rendre certaines de leurs parcelles à la nature sauvage avec une garantie sur le long terme.

* Source INPN 30 octobre 2021 : En métropole, les coeurs de parc national (0,77% du territoire) – Les arrêtés de protection de biotope ou de géotope (0,32% du territoire) – Les réserves naturelles nationales, régionales et de Corse (0,36% du territoire) – Les réserves biologiques forestières dirigées et intégrales (0,09% du territoire)

** La protection forte de l’Europe a été définie par l’initiative Wild Europe en 2012 : « Un espace à haute naturalité est une zone gouvernée par des processus naturels. Elle est composée d’espèces et d’habitats naturels et suffisamment grands pour le fonctionnement écologique effectif des processus naturels. Il est non ou peu modifié et sans activité humaine intrusive ou extractive, habitat permanent, infrastructure ou perturbation visuelle. » Ce qui signifie une zone sans chasse, sans exploitation du bois, des terres ou des minéraux, sans contrôle des espèces.

En savoir plus sur la libre évolution de la nature : https://www.coordination-libre-evolution.fr/

Mesure 20 : Interdire la chasse au moins deux jours par semaine dont le dimanche, ainsi que les jours fériés et les vacances scolaires.

Sous-mesure mineure : interdire la chasse au moins deux jours par semaine dont le dimanche. 

La France compte moins d’un million de chasseurs, qui ont provoqué 3.325 accidents de chasse ces 20 dernières années, dont 421 mortels selon les chiffres de l’Office français de la biodiversité. De plus en plus de Français, utilisateurs du milieu naturel et non chasseurs, ne supportent plus de se faire confisquer l’accès à la nature six à huit mois par an, par les titulaires du permis de chasse, pourtant moins nombreux chaque année (-25% en 2020 par rapport à 2000) et qui représentent à peine plus de 1% de la population française. Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître qu’il existe un conflit d’usage qui ne se résorbera qu’en limitant les interactions entre non-chasseurs et chasseurs.

Le rôle de régulateur du chasseur est également décrié, puisque malgré des prélèvements de sangliers qui ont augmenté de + de 2000% entre 1970 et 2020, jamais ces animaux n’ont été aussi nombreux. De l’aveux de Willy Schraen, Président de la Fédération nationale de chasse, sur RMC le 9 novembre dernier, les chasseurs ne régulent pas. Ils ont déséquilibré durablement le milieu naturel en détruisant les prédateurs, en relâchant des animaux issus d’élevages et en nourrissant le gibier. Des études scientifiques montrent que l’arrêt de la chasse de certaines espèces (comme le renard) n’a pas entraîné l’explosion démographique annoncée par les chasseurs dans les pays voisins. 

La chasse est un loisir qui tue des animaux sauvages, mais qui met aussi en danger les êtres humains. Suspendre la chasse deux jours par semaine, dont le dimanche, les jours fériés et les vacances scolaires, permettrait aux Français non chasseurs de se reconnecter avec la nature en toute quiétude. Cela diminuerait aussi fortement le nombre d’accidents de chasse, qui ont lieu principalement le dimanche, et offrirait aussi une trêve aux animaux sauvages.

Selon le sondage Ifop de février 2022, 83% des Français se déclarent favorables à ce que soient instaurés 2 jours sans chasse par semaine (dont le dimanche) et l’intégralité des vacances scolaires.

Mesure 21 : Supprimer la liste des espèces « nuisibles » et retirer de la liste des espèces chassables celles dont les populations sont en déclin ou menacées.

Sous-mesure mineure : Retirer de la liste des espèces chassables celles dont les populations sont en déclin ou menacées.

Sous-mesure mineure : Réformer la liste des espèces « nuisibles »

Chaque année, en France, des millions d’animaux sauvages sont massacrés, par tir, piégeage, déterrage. Anciennement qualifiés de « nuisibles » les « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » sont classées sur une liste revue tous les 3 ans par le Ministère en charge de l’Écologie et qui détermine dans quels départements renards, fouines, martres, belettes, putois, corbeaux freux, corneilles noire, pies bavardes, geais des chênes et étourneaux sansonnet seront tués toute l’année sans quotas spécifiques. Ce traitement spécial infligé à certaines espèces animales a de graves conséquences sur les populations de ces espèces, mais aussi sur leur milieu. D’innombrables données scientifiques ont clairement confirmé l’utilité des prédateurs naturels sur notre environnement, qu’il est pourtant primordial de protéger. Maillons essentiels à l’équilibre d’un milieu, ces espèces permettent par exemple de réguler naturellement les populations de rongeurs. Si les dégâts aux cultures et aux récoltes sont parfois invoqués, ces considérations sont généralisées à l’ensemble du département au lieu de s’appliquer au cas par cas. Elles ne doivent plus être suffisantes pour tuer les animaux sur l’ensemble du département, sans quotas, sans tenir compte de leur utilité dans l’écosystème ou des mesures alternatives possibles.

Quant à la liste des espèces chassables en métropole, elle comprend 91 espèces dont au moins un tiers (putois, lièvre, tourterelle des bois, tétras, perdrix, barge à queue noire, …) est en déclin ou est classé en mauvais état de conservation sur la liste rouge des espèces menacées dressée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Sur ce point, la réglementation va donc à l’encontre de toute logique de préservation de la biodiversité. A l’aune de la 6ème extinction de masse, il est indispensable de revoir cette liste pour en retirer les espèces en déclin ou en mauvais état de conservation.

Ressources :

Arrêté du 3 juillet 2019 pris pour l’application de l’article R. 427-6 du code de l’environnement et fixant la liste, les périodes et les modalités de destruction des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts

·  Arrêté du 26 juin 1987 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée

·  Arrêté du 17 février 1989 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée sur le territoire du département de la Guadeloupe·  Arrêté du 17 février 1989 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée sur le territoire du département de la Martinique

·  Arrêté du 25 août 2008 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée sur le territoire du département de La Réunion

·  Arrêté du 27 juin 1985 fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée dans l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon

Mesure 22 : Interdire les pratiques de chasse et de piégeage cruelles et barbares à l’encontre des animaux sauvages (chasses traditionnelles, chasse à courre, la vénerie sous terre, chasse à l’arc, chasse en enclos, pièges tuants, mutilants et non sélectifs)

Parmi les modes de chasse et de piégeage, les pratiques cruelles et barbares doivent être bannies car elles entraînent des souffrances excessives et inutiles. Il s’agit notamment des chasses traditionnelles, chasse à courre, vénerie sous terre, chasse à l’arc, chasse en enclos et des pièges tuants, mutilants et non sélectifs. Le respect de la tradition ne peut justifier de perpétuer ces types de chasse cruels et barbares pour les animaux.

Selon un récent sondage, 85% des Français souhaitent que les actes de cruauté sur les animaux sauvages soient interdits et 83% des Français sont favorables à l’interdiction du déterrage des blaireaux (sondage Ipsos 2018 pour One Voice). La chasse à la glu et autres chasses traditionnelles (à la tenderie, à la matole, aux pantes) piègent les oiseaux, parfois d’espèces menacées, entraînant stress, blessures et parfois mort. Ces pratiques sont malheureusement toujours autorisées dans la loi alors même qu’elles ont été jugées contraire au droit de l’Union européenne par les tribunaux.

À la chasse à l’arc, l’animal est rarement tué sur le coup et peut connaître des heures d’agonie. Lors de la chasse en enclos, les animaux, prisonniers sur un territoire, ne peuvent pas s’échapper. La traque peut durer longtemps, accroissant leur stress d’autant. Il apparaît également urgent que certains modes de piégeages soient également remis en cause en raison de la souffrance inutile qu’ils infligent. Tous les pièges tuants et blessants  s’avèrent non sélectifs et tuent animaux domestiques et espèces protégées dans d’atroces souffrances. Les pièges cages sont des solutions alternatives.

La chasse à courre et la vénerie sous terre, sont expliquées ci-dessous. Nos organisations demandent l’interdiction de l’ensemble de ces pratiques de chasse et de piégeage.

Sous-mesure mineure: Interdire la chasse à courre.

Cette mesure premier pas permet au candidat de s’engager à interdire au moins la chasse à courre. La chasse à courre connaît un très fort rejet dans la population. Selon un sondage
Ifop de février 2022, la grande majorité des Français (86%) se déclarent contre la chasse à courre. 

Cela est bien sûr dû aux problèmes de sécurité que cette pratique engendre dans les zones rurales ou forestières (fréquentes invasions de villages et de jardins, accidents de voiture, attaques de chiens domestiques en balade, etc.). Mais la cruauté de ce mode de chasse est la principale raison de ce rejet massif, d’autant plus quand on considère le faible intérêt de la chasse à courre en termes de régulation des espèces. En 1997 déjà, une étude scientifique* préconisait l’abolition de cette pratique sur la base de données physiologiques démontrant la souffrance engendrée sur les animaux sauvages lors de ces traques. Au regard des souffrances qu’elle induit, cette pratique de chasse n’a plus sa place dans notre société moderne.

Sous-mesure intermédiaire: Interdire la chasse à courre et la vénerie sous terre.

Cette mesure intermédiaire permet au candidat de s’engager à interdire la chasse à courre (expliquée ci-dessus) et la vénerie sous terre, deux types de chasses particulièrement cruels. La vénerie sous terre consiste en la préhension d’un blaireau dans son terrier par les chasseurs appelés “veneurs” au moyen de pinces métalliques après plusieurs heures de creusement et en présence d’une meute de chiens qui cherchent à acculer l’animal traqué et à le dévorer. Elle est source de souffrances physiques et psychologiques intenses.

Sources :

https://ava-france.org/incidents-chasse-a-courre/

Sur la base de prélèvements biologiques, « une chasse prolongée avec des chiens génère chez le cerf un stress extrême et sans doute une grande souffrance. BATESON, Patrick et BRADSHAW, Elizabeth L. Physiological effects of hunting red deer (Cervus elaphus). Proceedings of the Royal Society of London. Series B: Biological Sciences, 1997, vol. 264, no 1389, p. 1707-1714